« On a commencé par les idées, sur les 5 dernières années, en s’inspirant des différents mouvements sociétaux en rapport avec les gilets jaunes, le féminisme, l’anti-racisme, les mobilisations pour le climat, confie Samuel Grzybowsky, l’un des porte-parole de la Primaire Populaire. On a trouvé 10 propositions communes issues de ces mouvements sociaux à partir desquelles on a écrit 10 mesures. Elles forment le « socle commun » validé par 13 partis politiques de gauche à qui on propose de nous rejoindre et de s’unir pour désigner un candidat désigné par les citoyens en janvier 2022 », poursuit le militant. A l’automne 2021, la Primaire Populaire compte des milliers de bénévoles à travers la France, et plus de 166 000 signataires. Les premiers parrainages ouverts à tous les citoyens sur le site internet jusqu’à la mi-octobre 2021, engrangent plus de 125 000 signataires. Ces derniers peuvent parrainer et ajouter, s’ils le souhaitaient, leurs candidats idéals idéaux. Le 13 octobre 2021, les 5 femmes (Christiane Taubira en tête, Anne Hidalgo, Clémentine Autain, Charlotte Marchandise, Anna Agueb-Porterie) et les 5 hommes (François Ruffin en tête, Jean-Luc Mélenchon, Yannick Jadot, Pierre Larrouturou, Gaël Giraud) qui ont reçu le plus de voix sont désignés.
« Notre objectif principal est de se faire connaître, d’augmenter les signatures, car nous sommes très peu relayés par les médias, confie Martine Lafutte, bénévole à la primaire populaire à Marseille. Adhérente à un parti politique et secrétaire médicale de profession, elle va à la rencontre des citoyens sur les marchés. « On se rend compte qu’il y en a beaucoup qui baissent les bras mais aussi beaucoup comme nous, qui aimeraient s’engager mais ne savent pas comment faire, remarque-t-elle. Je leur propose donc de venir avec nous pour faire entendre la voix des citoyens qui aimeraient que les élites politiques cessent de voir leur monde à eux et se rendent compte des préoccupations et des réalités des citoyens ».
Changer de système, être à l’écoute des citoyens
A Toulouse, Robin et Diane, deux étudiants de Sciences Politiques, coordonnent la Primaire Populaire qui rassemble une soixantaine de personnes. « 85% des jeunes n’ont pas voté aux dernières élections départementales et régionales. Pourtant certains sont politisés mais ne croient plus au système politique tel qu’il est fait. Il y a un vrai enjeu à redonner du pouvoir au citoyen dans le choix des candidats, ce que l’on fait à la primaire populaire avec le vote au jugement majoritaire. Cela permet de voter pour plusieurs candidats en donnant un avis de “Très bien” à “A rejeter”. Celui qui reçoit le plus de mentions positives sera désigné» , confie Robin, 21 ans, en master 1 environnement, qui pense qu’on vit dans un système utopique voué à l’effondrement. « Je suis convaincu que la crise écologique, sociale et démocratique est systémique et que la réponse doit être politique avec des personnes à la hauteur de ces enjeux ».
Inverser le système actuel en partant des idées sans candidat pour ensuite en désigner un qui rassemble toutes les idées de la gauche est le pari un peu fou de cette primaire populaire. En décidant de s’allier à la Primaire Populaire, le candidat s’engage en effet à respecter le socle commun composé de 10 mesures construites autour de l’écologie, la justice sociale et la démocratie, un credo proche des programmes politiques des candidats de gauche. L’enjeu est donc de les convaincre, « Les candidats de gauche arrivent en dernière position donc ils n’ont pas vraiment le choix. S’ils veulent gagner il va falloir écouter et prendre en considération les volontés des citoyens qui s’expriment partout en France à travers la Primaire Populaire, et qui comprend des non encartés, des personnes désabusées de la politique et des abstentionnistes, martèle Samuel Grzybowsky. Nos idées sont majoritaires. Les intentions de vote cumulées de cet espace représentent 30 à 32% c’est plus que Mitterrand en 80 qui était à 25%. S’ils se rassemblent sous la même étiquette, on gagne haut la main ! ». Une proposition reconnue par bon nombre de cadres à l’intérieur même des partis de gauche, selon le militant, mais qui n’ont pas encore réussi à faire pencher la balance auprès des leurs.
Un mouvement populaire
Parmi les militants de la primaire populaire, des jeunes très motivés, des retraités enchantés, il y a comme un air de bienveillance, de bonheur, d’espoir, mais aussi de rigueur, de terrain, de proximité, qui se dégage de ce mouvement inédit. « Je me suis laissée embarquée par leur énergie, j’ai aimé leur façon de faire, respectueuse et paritaire avec une maîtrise des outils de l’intelligence collective qui leur permet de former au bénévolat des gens de tous milieux» , témoigne Brigitte, informaticienne à la retraite à Marseille, fidèle aux urnes. Même s’ils sont diplômés, ils savent parler à tout le monde et respectent les gens, ils pourraient être de grands manipulateurs mais ils sont au service d’une cause et ils sont alignés avec les valeurs qu’ils représentent. Ce n’est pas vide comme la classe politique actuelle. » Les actions de terrain quotidiennes menées par des personnes de différents horizons permettent aux bénévoles engagés sur tout le territoire d’aller à la rencontre du plus grand nombre. « On passe moins de temps dans les débats de l’entre soi, du copinage auquel j’ai assisté dans un parti politique, et on est plus dans l’action c’est ça qui m’a plu”, confie Pierre, jeune professeur dans la banlieue lilloise, Je suis à fond, je vis primaire populaire, c’est maintenant ou jamais, en réintroduisant des éléments de la démocratie. Sur le nucléaire par exemple, on n’est pas tous d’accord. Ce n’est pas grave dans la mesure ou on peut avec un débat et une ouverture démocratique, informer les gens avec des experts comme l’a fait la convention citoyenne ».
NB : cet article a été écrit en novembre 2021 et mis à jour en avril 2022.