C’était le 22 février en Algérie. Des dizaines de milliers de personnes défilant dans les rues du centre-ville, déterminées à protester contre le cinquième mandat du Président Abdelaziz Bouteflika et étonnées de se retrouver si nombreuses. Depuis, le soulèvement algérien résonne partout en Méditerranée, comme une leçon vivante de la capacité des peuples à se mobiliser pour retrouver leurs droits et leur libre arbitre.
Au terme de ces 5 dernières semaines de protestation, les questionnements sont nombreux : comment briser l’oppression qui empêche de défendre ses valeurs ? Comment continuer de façon unie et constructive ? Si le déroulement pacifique des rassemblements a permis de déstabiliser le système en place en Algérie, c’est l’incertitude quant aux futures réactions des autorités.
On aurait pu croire les Algériens maintenus dans un état de sidération. Une majorité silencieuse qui n’empêchait pas un mécontentement latent depuis de nombreuses années.
Le déclenchement de la mobilisation résonne comme un : “ça suffit !”. Même si aujourd’hui, les Algériens ne sont pas sûrs d’avoir les clés pour construire une alternative.
Et maintenant, on va où ? Tables rondes, réunions de quartier, débats en famille, ça discute politique à tous les étages. Mais comment se fédérer au niveau national autour de questions et combats communs ?
“Dégage”, “Je veux grossir, je veux changer de régime”, “Le peuple veut la chute du régime”, “Voleurs, vous avez mangé le pays”. Ces slogans, on pourrait les retrouver, et on en retrouve certains, en France dans les manifestations contre le gouvernement actuel. Les citoyens partout en Méditerranée revendiquent un droit de regard sur les politiques menées par les autorités et qui vont à l’encontre du respect des droits de l’homme.
Réfugiés en France, au Liban et au Kurdistan irakien, de jeunes Syriens regardent l’Algérie avec de sombres espoirs. Huit ans après le début du soulèvement dans leur pays, ils sont épuisés et analysent avec sagesse : “l’histoire qui se répète dans les pays arabes” où les systèmes et régimes semblent indétrônables. L’espoir est cependant plus vivace pour l’Algérie et le Maghreb qu’ils considèrent aujourd’hui plus libres et dont ils espèrent que les mouvements resteront pacifiques “afin d’éviter les ingérences étrangères”.
Partout en Méditerranée, on observe, on retient son souffle face à cette révolution joyeuse… Certains Tunisiens craignent un scénario à la libyenne. Les autorités restent étonnamment et majoritairement silencieuses. Le peuple algérien nous surprend, il nous enchante. Certains depuis Marseille prennent l’avion une fois par semaine pour participer aux grandes mobilisations du vendredi, envie de dire “j’y étais”, envie de témoigner. Nous aussi.