Un Européen passe en moyenne 34 années de sa vie à travailler. Et parfois, il en meurt. Les malades de l’amiante, les agriculteurs et les pesticides, les travailleurs de l’acier dans les Pouilles, ou ceux du pôle chimique de Huelva en Espagne. Les ouvriers agricoles, industriels, artisans, sont historiquement les premiers touchés par les maladies professionnelles. Ce sont parfois des migrants venus occuper des emplois que nous ne voulons plus, notamment dans les champs des campagnes françaises, italiennes et espagnoles. Ceux-là sont aussi victimes des abus d’un système où pour trouver du travail, l’individu est prêt à accepter toutes les conditions imposées, sans que ses droits soient respectés. En Turquie, l’Assemblée pour la santé et la sécurité des travailleurs publie des rapports accablants et répertorie en moyenne 168 décès par mois dans le pays.
Plus pernicieux, l’invention de méthodes de management censées nous rendre plus productifs et plus compétitifs a entraîné son lot de souffrances au travail. Des souffrances psychiques, parfois invisibles car on ne les exprime pas, mais qui peuvent aussi mener à la mort. Comme pour Yannick Sansonetti, salarié du groupe Lidl en France, qui s’est suicidé en 2015. Ses proches se battent aujourd’hui pour faire reconnaître le burn-out dans la loi française. La proposition présentée par le député François Ruffin a été retoquée au parlement en début d’année. En Israël, les centres d’appels fleurissent et mettent les employés sous pression : il faut répondre à un maximum d’appels, vendre des produits, n’importe lesquels. Un stress qui comme ailleurs, est encore très peu pris en compte par la médecine du travail.
Certains prennent la parole pour défendre le droit des travailleurs, et leur santé. Pour faire reconnaître ces maladies, comme les avocats de Batna en Algérie, mais aussi pour améliorer les conditions de travail comme les CHSCT (Comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail) en France, menacés de disparaître pour la majorité dans le cadre de la réforme du travail. La protection collective des salariés et la reconnaissance des maladies professionnelles, grandes batailles pour ces comités, sont mises en difficulté par les ordonnances Macron. Des problématiques qu’on ne saurait cantonner aux seuls ouvriers… Il est aussi question de santé publique et chaque citoyen est concerné, car les pollutions émises par ces usines ne s’arrêtent pas à la limite des sites.